mercredi, février 13, 2008

L'industrie TIC en Inde, sacrée vache de l'année ?

OutlookIndia évoque le 22 octobre 2007 un sujet d'importance pour tous les informaticiens indiens : les problèmes de santé liés à la pratique intensive de l'informatique. "Les indiens urbains payent de leur santé le prix de leur carrière dans les métiers à haute teneur en informatique", avertit le journaliste en guise de sous-titre. Et il évoque ensuite le cas de plusieurs jeunes informaticiens passant 8 à 9 heures par jour devant leur écran à produire du code, obligés après quelques années de s'arrêter pour maladie. Ils sont victimes de CRI (Computer-related injuries), maladies réparties en trois grandes catégories : problèmes visuels, troubles orthopédiques dûs à des postures inadaptées, et plus fréquemment, des traumatismes dûs à la répétition du stress. Ces CRI représentent aujourd'hui la plus forte croissance des risques professionnels en Inde.
Tout cela est dû à une ergonomie inexistante et à de mauvaises habitudes de travail dans les secteurs où l'on pratique l'informatique de manière intensive. Ce n'est pas tant la prévalence de ces traumatismes qui est inquiétante que leur sévérité. Par exemple, le RSD (distrophie sympathique réflexe) est un trouble neurologique chronique qui fait de très nombreux "invalides" parmi une population jeune et de haut niveau.

Toutes ces pathologies ont un facteur en commun, la station de travail. Disposition du corps, des yeux, des mains, écran, station assise longue, lumière ambiante, climatisation... tout y passe. Les remèdes ne sont pas simples : de la chirurgie à la médecine traditionnelle, de l'orthoptie aux onguents, sans compter les arrêts de travail multiples et répétés... l'Inde commence à être malade de sa spécialisation.

Restent deux catégories d'entreprises attentives à ces problèmes : les filiales d'entreprises étrangères qui ont rencontré des problèmes similaires ailleurs, qui leur ont valu des poursuites pénales ; et les entreprises locales dont les managers ont pu être eux-mêmes affectés par ces troubles, et qui -du coup- y accordent une grande importance.

Ce qu'on peut en dire :

Offshore et informatique ? On pense inévitablement à l'Inde. Là-bas,
de nombreuses usines à logiciel locales s'enturbannent derrière le CMM (Capability Maturity Model), comme LE critère de qualité ultime. Mais le CMM n'intègre pas les taux d'invalidité... Il faudra pourtant bien un jour faire en sorte que l'investissement consenti par la société indienne pour former ses élites technologiques ne soit pas diminué par une augmentation des incapacités de travail, et ce, bien avant l'âge théorique de la retraite. Cela passera sans doute par l'amélioration des conditions de travail de ces jeunes ingénieurs, qui voudraient bien devenir vieux (c'est encore le seul moyen qu'on ait trouvé de vivre longtemps...).

Leur salaire se rapproche peu à peu des standards occidentaux (avec une croissance annuelle de 8 à 15 %, on n'est pas étonné de ce rattrapage). Et il faudrait y ajouter des dépenses pas vraiment prévues au départ :
  • des locaux modernes et adaptés (éclairage, silence, climatisation, lieux de détente...),
  • du mobilier convenable (sièges, bureaux),
  • du temps de pause non directement productif,
  • une médecine du travail de proximité,
  • des syndicats efficaces,
  • inscrivez-ici-vos-conditions-de-travail-idéales...
Un peu ce qu'on connaît chez nous, en fait. Mais ces améliorations ont un coût ! De quoi limiter l'intérêt économique de l'offshore si toutes ces dépenses sont, au final, facturées au client...

A moins, bien sûr, que l'engouement pour les ingénieurs indiens ne relève pas que de l'attractivité salariale.

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